Perdre le fil… faire des efforts pour
relier le discours.
Il appelle de la
montagne, il dit : triathlon, belle descente.
Il demande si ça va.
Physiquement beaucoup mieux, merci.
Je lui dis que j’en
ai marre des conversations TF1.
J’ai besoin d’autre
chose, tu comprends.
Il dit qu’il
m’envoie des bisous et des fleurs…
Il demande si cela
est toujours TF1.
Je réponds que oui…
De toutes façons, ma
vie, en ce moment ce sont
des points de
suspension… une télé vide.
Perder el hilo... hacer esfuerzos por hilvanar el discurso. Llama desde la montaña. Dice:
triatlón, súper descenso, pregunta qué tal. Físicamente, mucho mejor, gracias.
Le digo que me
harto de los discursos Tele 5 Necesito otra cosa ¿entiendes?
Dice que me envía besos y flores...
Me pregunta si todavía suena muy
Tele 5
Le digo que sí...
Mi vida, en este momento está hecha
de puntos
suspensivos... es una tele vacía.
La terre hirsute, le vent de février, son bonnet d’un bleu
étoile…
On reprend
les balades. Loco tresse des huit
entre nos jambes.
Le temps
de l’acceptation.
Chaque pas est un huit mille.
Mon amie dit que ce que nous avons perdu
ne revient jamais complètement
mais
on grandit forcément.
Ma
belle-sœur, elle, me parle de constellations cosmiques,
de mauvais karma,
d’ennemis, de boucliers, de protection.
Je télécharge,
j’installe, je supprime des virus.
Je me rends compte que
les
crevasses les plus profondes
ne
seront jamais des rides mais
des cicatrices. J’écoute… et
parfois j’oublie.
La beauté
d’un poème est son arrière-boutique.
La tierra hirsuta, el viento de febrero, su gorro azul
estrella...
Retomamos paseos
cortitos. Loco trenza ochos
entre nuestras piernas.
Tiempo de aceptación.
Cada paso es un
ocho mil.
Mi amiga dice que lo que perdimos
no regresa jamás completo
pero
crecemos con ello.
Mi cuñada, me habla de constelaciones cósmicas
de mal karma, de enemigos, escudos y protección.
Descargo, instalo, suprimo virus.
Me doy cuenta
de que
las llagas más profundas
no serán jamás
arrugas sino
cicatrices. Escucho... y a veces,
olvido.
La belleza de un poema
es su trastienda.
Le jour de
l’éclipse, lorsque tout s’obscurcissait : la lumière fut
et naquit l’envie d’avoir un piano à la maison
Éric
me dit : « écoute le néant, il y a beaucoup de choses à
l’intérieur »
Rafa et moi nous nous croisons, sans nous voir, comme deux
poissons rouges, vers Gibraltar.
Le matin de l’éclipse joue à cache-cache.
88 touches, deux infinis debout, pour commencer.
El día del eclipse, cuando todo se oscurecía : la luz,
las ganas de un
piano en casa
Éric me dice :
« escucha la nada, hay muchas cosas dentro »
Rafa y yo nos
cruzamos, sin vernos, como dos peces rojos
camino de Gibraltar.
La mañana del
eclipse que juega al escondite
ochenta y ocho
teclas, dos infinitos de pie, para empezar.
Elle veut arrêter de fumer, pour commencer elle a
plaqué son Jules.
Elle est charnelle, elle aime
la mécanique, faire l’amour,
Adopte un mec.
Elle veut savoir comment ça se
passe.
Je dis : aujourd’hui
nickel, hier,
rouge, ils parlaient tous en
même temps. J’ai appris des mots :
subrogation, consolidation,
reclassé, déclassé, des acronymes :
Sameth, des sigles : TIP,
GFIP… Je flippe, nous flippions,
tous les AT
réunis, à entendre qu’il y a
des aides, et puis qu’il n’y en aura
plus,
et à la fin,
pour certains ça sera Pôle
Emploi. Hier, rouge,
Je ne comprenais pas, il n’y
avait rien d’écrit,
chacun vomissait sa plaie,
deux
heures et demie de messe à la
sécu.
J’ai levé la main :
j’avais compris et à l’instant
ça s’effaçait comme sur de l’huile,
« s’il vous plait,
pourriez-vous parler chacun votre tour ? »
Elle aime bien monter,
démonter, réparer, elle masse sans toucher.
Elle ne lâche rien. On rit.
« Tu sais ? Ça n’arrive qu’aux gens
géniaux. C’est juste un
contretemps. »
Je regarde ses cils
parfaitement noirs. Elle croque la vie, Cécile.
« Je répare des télés,
toi, écris tes poèmes »
Chacun son mode
d’emploi : elle, son AVC, moi, mon burn-out.
On est des survivantes. Hier
rouge, aujourd’hui, la toile du store
danse sa valse et tout est
bleu.
Quiere parar de fumar. Para empezar, ha dejado al novio.
Es carnal. Le gusta la mecánica, hacer el amor,
“Adopta a un tío”.
Quiere saber qué
tal.
Le digo: hoy genial, ayer
rojo,
todos
hablaban al mismo tiempo: aprendí palabras
subrogación,
consolidación, reclasificación, desclasificación;
acrónimos, siglas...
Flipé, flipamos, todos los que estábamos allí
por accidente laboral,
reunidos,
escuchando que hay ayudas, y después
dejará de haberlas
y al final, para algunos, será el INEM. Ayer,
rojo,
no me enteraba.
No había nada escrito,
cada uno vomitaba
en su herida, dos horas
y media de misa en
la Seguridad Social.
Levanté la mano
para decirles
que
entendía y al segundo siguiente lo comprendido
se desvanecía
como
si lo hubiera escrito sobre aceite.
¿Podrían hablar por turnos, por favor?
A ella le gusta
montar, desmontar, reparar, sabe hacer reiki.
Nos reímos. “¿Sabes? Esto solo le pasa a la gente
genial. Es sólo un
contratiempo”.
Miro sus
pestañas
perfectamente negras. Cécile se come la vida a bocados.
“Yo reparo teles,
tu escribe poemas”.
Cada uno con su prospecto: su ACV, mi Burn Out.
Somos supervivientes. Ayer rojo, hoy
el toldo baila su
vals y todo es azul.
Chez les
fous, les couverts trempent dans de l’eau
moussante
après le repas. Les phrases sont
courtes et les regards tombants.
Ils mangent vite dans leur vide, un
vide avide de plus rien.
Jean me raconte l’histoire du
docteur Long, qui avait un Bouddha sur sa
cheminée. Il adorait cette statue
quand il avait 6 ans.
Bien des années plus tard il avait
eu l’occasion de la revoir.
Jean a la mémoire d’une puce
informatique, des lunes, des heures,
des couleurs, quatre-vingts ans
croustillants d’histoires, de France
occupée, de Résistance, des juifs,
d’Arméniens, de stars de cinéma.
On chante, les têtes tachetées
d’électrodes. Ils veulent étudier nos
insomnies. Ça se passe à l'hôpital
psychiatrique.
Le vent souffle, dehors c’est la
tempête,
elle laisse sur la chaussée des
coquilles de vie, des cœurs sanglotant,
des miettes d’été que l’on ramasse car il
faudrait être fous, vraiment tarés,
pour les ignorer.
En el frenopático, los cubiertos quedan
a remojo después de cenar en agua
espumosa,
las frases son cortas y las miradas caídas.
Comen
rápidamente en su vacío, un vacío ávido de nada.
Jean me
cuenta la historia del doctor Long, que tenía un Buda encima de la
chimenea. Le encantaba esa estatua cuando tenía 6 años.
Después
de la guerra volvió a verla.
Se quedó decepcionado
porque en su memoria veía el buda
blanco,
y era gris.
Jean tiene una memoria de microchip, de lunas, de horas, de
colores,
ochenta años crujientes de historias, de la ocupación francesa, de
judíos,
de armenios, de actores de cine.
Cantamos, con nuestras cabezas llenas de electrodos. Quieren estudiar
nuestro
insomnio. Estamos en el psiquiátrico.
El viento violenta los
árboles,
deja en la
carretera, conchas de vida, corazones ensangrentados,
migas
de verano que recogemos porque habría que estar locos,
locos
de remate
para
ignorarlas.
***
Sans bâillon, le silence
l’accueillit, écoute son chant
Bécquer
mais elle est abeille et fleur. Fleur et fierté de jeune
feuille au va-et-vient de
l’automne. Les boucles de l’automne
frôlant sa peau. Ce souvenir du mal entre ses petites
lèvres. Ce
souvenir de second plan
entre les plis du passé. Tout l’occupe le
nouveau royaume. Les mots
murmurent un mantra lumineux. Et
elle tape, tape, elle
essaie de capturer la beauté que seuls les
plumes des oiseaux, la
mort ou le premier cri connaissent.
Sin mordaza el silencio la acoge, escucha su canto
como abeja que liba la flor. Y no
soporta a Bécquer, pero es abeja
y flor. Flor y orgullo de hoja amarilla
al son del otoño. Los rizos
del otoño rozando su piel. Ese recuerdo
del mal entre sus labios
menores. Ese recuerdo menor entre los
pliegues del fue. Todo
ocupa el nuevo reino. Las palabras
susurran un mantra de luz. Y
ella teclea, teclea, intenta capturar
la belleza que sólo el plumaje
de las aves, la muerte o el primer
grito conocen
Ilustración de Josep Mompou
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